Le 02/07/25
Emballages Alimentaires – Innovation, Durabilité et Perspectives
du 19/05/2025 dans les locaux de l’Ania
Cette table ronde a été organisée en collaboration avec Euramaterials et la Chaire Copack dans le cadre du colloque « Emballages alimentaires, innovation, durabilité et perspectives. Frédéric Merle (EuraMaterials) en assurait l’animation.
Cette table ronde a réuni cinq intervenants clés représentant la diversité des points de vue de la filière:
- Nicolas Pont, Directeur technique chargé du recyclage et de l’écoconception chez l’Eco-organisme Leko
- Muriel Case, Déléguée générale de Syndifrais, représentant la filière des produits laitiers frais.
- Christophe de Boissoudy, Président de l’AFCB (Association Française des Compostables Biosourcés), rassemblant l’ensemble de la filière du biosourcé, de l’amont agricole aux transformateurs.
- Agnès Jacquot, Directrice RSE et Communication des Sources Alma, leader français des eaux naturelles en bouteille qui dispose de trois sites de recyclage dont un en France.
- Juliette Beaulieu, Directrice du développement et du recyclage chez Citeo, responsable d’une équipe R&D dédiée au développement des filières de recyclage
Leurs échanges ont mis en lumière des points de convergence, mais aussi des débats vifs sur les technologies de recyclage, la réglementation européenne, l’accès à la matière recyclée, et la place du consommateur dans le système.
Les éco-organismes ont rappelé que les filières rigides PET et Polyoléfines (PE/PP) fonctionnent très bien aujourd’hui. La filière souple PE est déjà en partie fonctionnelle et la filière souple PP devrait fonctionner prochainement. En revanche, un important travail reste à faire sur la résine polystyrène ainsi que sur les films plastiques souples complexés.
L’extension des consignes mis en place par Citeo depuis 2022 a justement pour objectif la collecte de tous les emballages plastiques dans la poubelle jaune pour permettre l’optimisation des volumes collectés et favoriser le développement de nouvelles filières, mais avec aujourd’hui des résultats encore limités concernant la filière plastique et encore plus la filière plastique souple. La nécessité de changement des habitudes des consommateurs dans leur geste de tri étant identifié par Citeo comme une des raisons de ces difficultés.
Pour Leko, la « poubelle jaune » est un facteur limitant et qui reste peu adaptée au recyclage généralisé des différentes matières. C’est le cas pour la céramique, le bois ou le liège. Leko estime que l’amélioration du recyclage dans son ensemble passe par le développement de circuits de collecte alternatifs.
Chacun s’accorde sur le fait que Les centres de tri jouent un rôle central : ils sont la pierre angulaire de la recyclabilité. L’amélioration de la recyclabilité conformément à la réglementation européenne et le développement de nouvelles filières innovantes doit s’appuyer obligatoirement sur l’écoconception et le dialogue entre les différents maillons de la chaîne de valeur.
Le Cas de l’entreprise Sources Almal et le cas vertueux du recyclage du PET bouteilles avec un bémol sur l’approvisionnement en matière recylées.
Sources Alma, acteur majeur de l’embouteillage en France, s’engage activement dans une démarche d’économie circulaire en recyclant les bouteilles en PET collectées pour produire une résine de qualité équivalente à la matière vierge, apte au contact alimentaire. Chaque étape du processus est rigoureusement contrôlée, avec une attention particulière portée à la rhéologie des matériaux et à l’élimination des contaminants. L’entreprise a investi dans l’intégration de ses processus de recyclage, avec des centres situés à proximité des sites de fabrication des préformes, réduisant ainsi l’empreinte carbone liée au transport .
En matière d’éco-conception, Sources Alma travaille à l’allégement des films d’emballage et à l’intégration de matière recyclée, tout en réduisant l’épaisseur des bouteilles, certaines pesant moins de 13 g, afin de minimiser leur empreinte plastique.
Malgré les avancées technologiques permettant d’intégrer jusqu’à 100 % de matériaux recyclés, l’accès à la matière recyclée reste un défi majeur en raison de son coût et de sa disponibilité. Le taux de collecte des bouteilles en PET en France plafonne autour de 60 %, ce qui limite la disponibilité de rPET . La mise en place de systèmes de consigne est envisagée pour améliorer ce taux de collecte. Par ailleurs, la concurrence asiatique exerce une pression sur le marché du rPET, rendant l’approvisionnement plus complexe pour les acteurs européens
Débat autour du retour de la consigne et des enjeux économiques liés.
La mise en place de la consigne pourrait favoriser l’amélioration du taux de collecte. Toutefois, des interrogations subsistent quant à la propriété de la matière collectée et en particulier l’implication des collectivités locales. Le détournement de la matière PET des circuits classiques gérés par les collectivités pourrait entrainer une perte de revenus considérable des acteurs institutionnels du recyclage et entrainer une hausse des coûts de traitement et par là même une augmentation des écos-contributions.
La Filière Polystyrène
Suite à la loi Climat & Résilience, qui a envisagé l’interdiction du polystyrène dans les emballages, Syndifrais a initié une réflexion collective avec ses membres industriels et metteurs en marché. Il en est ressorti que le polystyrène demeure difficile à remplacer dans certaines applications alimentaires, en raison de ses performances techniques et de son intégration dans des lignes de production optimisées.
Pour répondre à ces enjeux, un consortium incluant des acteurs du recyclage a été constitué afin d’explorer des solutions durables. Cette collaboration a abouti à un projet basé sur le recyclage chimique par dépolymérisation via l’entreprise belge Indaver. L’usine, située à Anvers, conçue pour traiter jusqu’à 26 000 tonnes de polystyrène par an, a nécessité un investissement de 60 millions d’euros.
La première production est prévue d’ici la fin de l’année. Pour assurer la viabilité du projet, les industriels se sont engagés à maintenir les volumes de polystyrène disponibles et à intégrer la matière recyclée dans leurs nouveaux emballages. Parallèlement, Syndifrais a lancé une campagne de sensibilisation au tri des pots de yaourt, notamment en apposant des messages incitatifs sur les opercules, afin de massifier les gisements nécessaires à l’alimentation de l’usine.
Sensibilisation et Tri, un enjeu de société.
Comme indiqué plus haut, la sensibilisation des consommateurs au geste de tri peut s’avérer un frein au développement de nouvelles filières. Les pots de yaourt, par exemple, sont encore très peu recyclés aujourd’hui (on retrouve seulement 3 % des pots de yoghourt dans les flux dit « de développement »). Si le polystyrène de ces emballages finit rarement dans la poubelle jaune, c’est qu’il est souvent perçu comme inadapté ou sale. Le changement de nos habitudes en tant que consommateurs reste un challenge décisif pour assurer la massification des volumes et la rentabilisation des activités d’une filière très capitalistique.
Questions en Suspens sur le recyclage chimique
Le recyclage chimique soulève encore de nombreuses problématiques : la dimension des installations nécessaires, la disponibilité et la concentration géographique de la matière première recyclable (en vue de limiter l’impact du transport), le coût de traitement — clé pour assurer la viabilité économique –, ainsi que l’évaluation du bilan environnemental des technologies émergentes. Par ailleurs, il est essentiel d’atteindre une taille critique des usines pour garantir leur rentabilité.
La filière polystyrène développée par Syndifrais constitue une avancée notable, mais elle repose actuellement sur une unique unité de production en Belgique, chez Indaver. Cela interroge notre souveraineté industrielle : ne vaudrait-il pas mieux, en France, privilégier la création de plusieurs petites unités locales plutôt que de miser sur une méga-usine centralisée ? Cela permettrait de limiter les investissements unitaires et de raccourcir les chaînes de collecte des déchets.
Les Bioplastiques et le Compostage
L’AFCB (Association Française des Compostables Biosourcés) a rappelé que son activité concernait uniquement les plastiques biosourcés compostables, dont la fin de vie est généralement un recyclage organique. Les matières concernées incluent principalement les amidons complexes utilisés notamment pour les sacs de fruits et légumes mais aussi le PLA (Acide Polylactique), avec le projet d’implantation en France d’une usine par l’entreprise Futerro et des matériaux issus de procédés de fermentation comme le PBAT (Polybutylène Adipate Téréphtalate) et les PHA (Poly Hydroxy Alcanoates).
La Franca fait le choix de favoriser des matériaux compatibles avec le compostage domestique mais sans cadre clair. L’AFCB considère au contraire que le compostage industriel, réalisé selon des conditions bien contrôlées, permet de garantir un compost conforme aux normes de qualité exigées par les agriculteurs.
La question de la bonne biodégradabilité de ces plastiques biosourcés est traitée dans les travaux de la chaire CoPack portée par la fondation Agro Paristech auxquels participent les membres de l’AFCB. Les résultats de ces travaux montrent de très bon résultats de biodégradation de ces matériaux en condition de compostage industriels sans impact sur la qualité du compost. L’AFCB rappelle que 100 % des matériaux testés étaient certifiés.
Les travaux encore en cours devront maintenant démontrer l’absence de microplastiques issus de ces biomatériaux dans le compost final.
Pour revoir le colloque, cliquez !
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