Le 20/04/21

Dossier mis à jour le 21/04/2021

À la fois ancestral et moderne, le lin séduit aujourd’hui bien au-delà du secteur de la mode. Partons ensemble à la rencontre de cette plante-matière et de ses usages innovants, mis en avant par le dynamisme de toute une filière bien implantée en Hauts-de-France.

Au sommaire de notre dossier :
• Quelques points de repère pour (re)découvrir les lin, ses transformations, ses usages, ses atouts
• Les matériaux composites haute performance à base de lin : atouts et exemples d’utilisation
• La filière du lin en Hauts-de-France et le dynamisme de ses acteurs

Quelques points de repère pour (re)découvrir le lin, ses transformations, ses usages, ses atouts…

Une fibre textile végétale majoritairement européenne

Le lin, qui est l’une des rares fibres textiles végétales d’Europe, est majoritairement cultivé sur une zone côtière comprise entre Caen et Amsterdam.

L’Europe de l’Ouest est à ce titre la première zone mondiale productrice de fibres longues de lin (182 456 tonnes), grâce à la France (61% de la production mondiale), la Belgique (14%) et les Pays-Bas (2%) [chiffres CELC de l’année 2019].

Une ressource locale, naturelle et renouvelable dont il faut prendre soin

Champ de lin en fleurs

« Quand mars bien mouillé sera, bien du lin il te donnera » ; « juin fait pousser le lin, et juillet le rend fin » … Les proverbes agricoles ne s’y trompent pas : la météo joue un rôle important sur la qualité de la fibre de lin. La croissance de la plante est rapide et délicate : le lin doit pousser suffisamment pour obtenir un rendement satisfaisant, mais pas trop au risque d’être trop fin.

Pour atteindre en moyenne 1 mètre de haut (pour un diamètre de tige de 0,5 à 1 cm), le lin nécessite un climat de culture tempéré et humide. C’est pour cela que la Normandie et les Hauts-de-France sont les 2 plus grandes régions d’exploitation du lin.

Sur le plan écologique, la culture du lin est particulièrement avantageuse pour l’environnement :

  • elle nécessite très peu d’engrais et de pesticides, et n’emploie aucun produit chimique défoliant,
  • elle n’utilise aucun organisme génétiquement modifié (OGM),
  • elle est peu gourmande en eau (20 fois moins que le coton) et n’a pas besoin d’irrigation (à 99,99%).

De nombreux débouchés pour cette plante biodégradable, écologique et « zéro déchet »

Linge de maison en lin Crédit : Micheile Henderson - Unsplash

La matière première principale recherchée dans le lin sont ses fibres.

Les tonnes produites de « lin fibre » sont ainsi réparties :

  • 90 % utilisées par la filière textile :
    • 60% pour la mode & l’habillement : du prêt-à-porter à la haute couture ;
    • 30% pour l’ameublement intérieur : linge de maison, rideaux, tissus d’ameublement…
  • 10% dédiées à des applications techniques comme les textiles à usage technique, les composites haute performance, l’isolation pour le bâtiment…

Mais ce n’est pas pour autant que le reste de la plante est laissé pour compte : l’ensemble de la plante est valorisable ! Un exemple type de la ressource écologique « zéro déchet ».

Du lin, on ne jette rien
Les graines, fibres, poudres, anas (bois présent dans la tige) et fils de lin sont transformés en chemisiers, nappes, rideaux, toile de tente, panneaux agglomérés, isolants, litières, combustibles, panneaux de portières de voiture, raquettes de tennis, semences, huiles pour la phytothérapie ou pour le traitement du bois, solvants, paillages écologiques, aliments pour animaux, billets de banque américains…

La Confédération européenne du lin et du chanvre (CELC) synthétise cela dans cette illustration :

Les débouchés du lin (crédit CELC nov. 2020)

Les grandes étapes du lin pour passer de la graine au fil, puis au textile

  • La sélection et la production des graines de lin jouent un rôle important en amont de la culture.
  • Les semis (mars-avril) entament les 100 jours de culture de la plante.
  • L’arrachage de la plante arrivée à maturité (juillet) permet de préserver toute la longueur des tiges ensuite déposées au sol.
  • Le rouissage (juillet à septembre) est la première phase de transformation de la plante en fibre : rosée matinale, soleil et micro-organismes du sol agissent pour désolidariser naturellement les fibres textiles de la tige.
  • La récolte : le liniculteur assemble le lin en balles faciles à transporter.
  • Le teillage sépare mécaniquement (sans chimie) les différents composants de la tige de lin : fibres courtes, fibres longues, anas, poudres.
  • Le peignage parallélise, calibre et étire la fibre de lin sous forme de rubans doux et lustrés.
  • La préparation assemble différents rubans de lin peigné afin de produire des mèches de fil homogènes et de qualité.
  • La filature tord les mèches de lin préparées pour produire des fils : « au mouillé » pour les fils fins dédiés à l’habillement et au linge de maison, « au sec » pour les fils plus épais destinés notamment à l’ameublement.

Le fil de lin obtenu est ensuite tissé ou tricoté :

  • Le tissage entrecroise perpendiculairement les fils de lin pour créer des tissus.
  • Le tricotage produit un tissu maille apportant aux confections de lin leur souplesse, leur élasticité et leur infroissabilité.

Enfin, l’étape d’ennoblissement regroupe un ensemble de finitions possibles, pour décorer le tissu de lin ou lui apporter des fonctionnalités techniques.

©CELC

Les multiples propriétés du lin

  • Les secteurs de l’habillement et de la décoration apprécient le fait que les produits en lin soient respirants, thermorégulateurs, absorbants, résistants, à l’entretien facile et recyclable.
  • Sa résistance et ses propriétés d’isolant thermique et phonique séduisent l’écoconstruction et l’ameublement.
  • L’industrie est quant à elle attirée par sa rigidité, sa résistance, son absorption des vibrations et sa légèreté – source de gain de poids et de réduction des émissions de CO2.

Les matériaux composites haute performance à base de lin : atouts et exemples d’utilisation

La robustesse, la légèreté et la capacité d’absorption des chocs du lin en font une fibre naturelle idéale pour les matériaux composites à haute performance. Utilisés pour alléger les matériaux, et ainsi contribuer à réduire les émissions de CO2 dans l’industrie et les transports, les composites à base de lin sont une solution de choix pour assurer le compromis entre la légèreté et la résistance/performance des matériaux.

Les renforts en lin pour les matériaux composites sont utilisés dans le transport (automobile, ferroviaire, aérospatial), la construction, l’énergie éolienne, les sports & loisirs (skis, surfs, bateaux, raquettes de tennis…), l’ameublement ou encore la musique

Quelques exemples d’applications de ces matériaux composites à base de lin

Cabine de train Regio 2N en fibres végétales - Projet SINFONI. Crédits FRD, Stratiforme, Bombardier

Cabine de train Regio 2N de Bombardier en fibres végétales
Remplacement des renforts en fibres de verre par des renforts en fibres de lin et de chanvre, avec les mêmes procédés de mise en œuvre, et avec à la clé un gain de poids d’au moins 20%. Une pièce composite majeure réalisée grâce au projet SINFONI sur la structuration de la filière fibres techniques végétales lin et chanvre à usage matériaux.

Composite BIOCOMPAL haute performance bio-sourcé allégé pour des applications structurelles dans le secteur des transports
Une réalisation des partenaires franco-belges du projet BIOCOMPAL, dont vous pouvez visionner la vidéo de présentation du démonstrateur.

Matériaux composites à fibres de lin pour la voiture de course Cayman 718 GT4 CS MR Porsche ©Porsche

Habillage de la voiture de course Porsche 718 Cayman GT4 Clubsport MR
Porsche utilise des polymères renforcés de fibre de lin moulé pour les portières, l’aileron et les capots de cette voiture de course. Par rapport aux solutions classiques, cette composition réduit de 75% les émissions de CO2 lors de l’étape de fabrication.

SeaBioComp Applications de composites biosourcés en environnement marin

Applications de composites biosourcés en environnement marin
Le lin est étudié en tant que renfort de matériaux composites pour les applications du projet SeaBioComp. Ce consortium européen vise à développer de nouveaux composites biosourcés à matrice thermoplastique, tout en mettant au point des protocoles d’analyse pour évaluer leur durabilité à long terme et la réduction de l’impact environnemental en milieu marin.

GWALAZ – Fabrication du premier navire 100% fibres de lin ©KAIROS

Gwalaz, le premier trimaran 100% fibres de lin
Le concept boat « Gwalaz » de Kaïros a permis de tester en 2013 le remplacement des composites classiques par des matériaux bio-sourcés : fibre de lin, résine polyester partiellement biosourcée, âme liège et balsa. L’écoconception et la fabrication de ce navire 100% fibres de lin a été conduite en partenariat avec IFREMER et TRICAT.

La filière du lin en Hauts-de-France et le dynamisme de ses acteurs

La chaîne de valeur du lin dans les Hauts-de-France

La filière du lin compte en Hauts-de-France de très nombreux acteurs, représentant l’ensemble de la chaîne de valeur :

Les semenciers, les agriculteurs et leurs organisations interprofessionnelles

Parmi ces acteurs :

Les 50315 hectares de lin textile récoltés en 2020 dans le Pas-de-Calais, la Somme, le Nord, l’Aisne et l’Oise représentent 35,6% des surfaces françaises. Ce qui place la région Hauts-de-France 2ème région de production linière.

Les coopératives et entreprises de teillage (première transformation du lin)
Les professionnels de la seconde transformation du lin (peignage, non tissé, filature, tissage, tricotage, compostage, chimie, composites…)
Les centres techniques, les plateformes technologiques et les laboratoires recherche
Club d’entreprises et pôles de compétitivité
  • Un club d’entreprises textiles techniques : CLUBTEX
  • 2 pôles de compétitivité sont directement concernés par les matériaux et les agroressources : EuraMaterials et IAR.

Sans compter les entreprises de négoce et celles utilisatrices finales du lin (habillement, décoration, composites…).

Quand la R&D régionale cherche à optimiser les procédés de traitement du lin

Pour illustrer l’apport concret de la recherche aux entreprises de la filière lin, citons deux exemples de projets collaboratifs de R&D en région Hauts-de-France – qui ont obtenu notre label EuraMaterials :

  • Projet FilaTextUS • Production de fibres de lin textile pour la filature open-end par procédé ultrasonique et ensimage vert
    Partenaires : Van Robaeys Frères, ULCO/UCEIV, Textile des Dunes
    Projet soutenu par l’ADEME : appel à projets recherche GRAINE 2018
  • Projet Innofild lin • Amélioration des pratiques de culture, de teillage, et de caractérisation des matières, pour développer la filière lin fibre et lui faire conserver sa place de leadership mondial
    Projet à l’échelle inter-régionale porté par C.I.P.A.LIN
    Projet soutenu par France Agrimer dans le cadre du Grand plan d’investissement : appel à projets Structuration des filières

La structuration de la filière régionale et le rôle actif de CLUBTEX et EuraMaterials

Avec CLUBTEX – le club d’entreprises des textiles techniques – et en interface avec les pouvoirs publics, nous menons depuis plusieurs années un travail pour structurer et mettre en avant cette filière d’excellence du lin en Hauts-de-France, afin de soutenir les entreprises et le savoir-faire industriel textile régional.

Et la démarche paie ! En témoignent les récentes annonces de projets d’investissement portés par 3 entreprises locales – dont nous avons accompagné les candidatures au plan de soutien France Relance :

Van Robaeys-Membre EuraMaterials

Van Robaeys Frères développe une activité de récolte et de teillage de lin sur des lignes de production de type industriel. Son projet d’investissement consiste à améliorer les lignes de teillage pour mieux traiter les fibres de lin (y compris courtes) et à investir dans des moulins finisseurs qui donneront un meilleur aspect à la matière. L’investissement induira le recrutement de 4 salariés supplémentaires.

Nouveau logo de Peignage Dumortier, membre EuraMaterials


Peignage Dumortier est le dernier peignage français. Son métier consiste à préparer des rubans à façon, à destination des filateurs. L’entreprise porte le projet PEIGNAGE 4.0. pour moderniser et diversifier son activité, appuyant ainsi le développement d’une filière française des fibres végétales naturelles (lin et chanvre).

Logo Safilin

Le filateur Safilin a officialisé le 8 mars 2021 la réimplantation d’une unité de filature de lin dans les Hauts-de-France, en vue de produire du fil de lin 100% français. Cette relocalisation de filature est la concrétisation du projet LINFILA, grâce auquel 30 collaborateurs seront recrutés courant 2021 (20 autres emplois seront créés d’ici 2024).

Au-delà de nos actions en Hauts-de-France, nous avons également tissé des liens et réalisé des actions dans d’autres régions françaises, auprès d’acteurs tels Tenthorey, Peltex Industrie, C.I.P.A.LIN, Dehondt Technologies… et à l’étranger, auprès d’acteurs et partenaires situés sur le territoire de l’Eurométropole, en Belgique et aux Pays-Bas.

Vos contacts EuraMaterials & CLUBTEX sur ce vaste sujet du lin : Nicolas MARTIN & Jean-Marc VIÉNOT.


Parmi nos sources externes : ADEME, ARTE, CELC, C.I.P.A.LIN, FRD, Futura Sciences, Le lin côté nature, Safilin, The Good Goods
Crédits photo : BIOCOMPAL, Bombardier, CELC, FRD, Kaïros
, Porsche, SeaBioComp, Stratiforme

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