Le 09/09/24

Le plastique est aujourd’hui au cœur d’un débat intense et complexe, divisé entre ceux qui le défendent pour ses multiples avantages et ceux qui dénoncent ses effets dévastateurs sur l’environnement.
Nous explorerons d’abord les arguments en faveur du plastique, soulignant son rôle crucial dans notre société moderne, puis examinerons les critiques de plus en plus pressantes contre ce matériau omniprésent.
Enfin, nous réfléchirons aux moyens d’encadrer son usage de manière responsable, sans compromettre notre sécurité alimentaire ni renoncer complètement à certains aspects de notre confort.

L’une des principales raisons pour laquelle le plastique est largement utilisé est sa capacité à protéger les aliments.
Les emballages en plastique offrent une barrière efficace contre les contaminants, l’humidité, l’air et la lumière, prolongeant ainsi la durée de conservation des produits alimentaires.
Cela contribue non seulement à la sécurité alimentaire mais aussi à la réduction du gaspillage alimentaire.

Le plastique est un matériau incroyablement versatile.
Il peut être moulé, coupé, et transformé en une multitude de formes et de tailles, ce qui en fait un matériau de choix pour une grande variété d’applications industrielles. Cette facilité de transformation permet la production de biens à grande échelle, tout en maintenant des coûts relativement bas. Toutes les industries utilisent aujourd’hui ce matériau sous différentes formes pour réaliser des biens essentiels.
Dans l’industrie automobile, le plastique est utilisé pour produire des pièces légères et résistantes, réduisant ainsi le poids des véhicules et contribuant à une meilleure efficacité énergétique, dans l’industrie de l’électronique, les boîtiers en plastique protègent les composants électroniques sensibles contre la poussière, l’humidité, et les chocs, les plastiques sont également utilisés pour les cartes de circuits imprimés (PCB), les connecteurs et les claviers.
Dans l’industrie médicale, les plastiques sont utilisés pour fabriquer des seringues, des gants, des cathéters, et d’autres dispositifs médicaux à usage unique, assurant une hygiène et une sécurité maximales pour les patients et les professionnels de la santé.

Malgré ses nombreux avantages, le plastique a des impacts environnementaux dévastateurs. L’une des principales critiques est sa contribution à la pollution des océans. On estime qu’entre 9 à 14 millions de tonnes de déchets plastiques sont déversées chaque année dans l’Océan, c’est 1 tonne de déchets plastiques qui se déverse dans les océans toutes les 3 secondes. Les déchets forment ainsi des « continents » de déchets flottants affectant gravement la faune marine.

Par ailleurs, les plastiques contiennent souvent des additifs chimiques (comme les phtalates, les bisphénols et les retardateurs de flamme) qui peuvent être libérés dans l’eau de mer.
Ces substances toxiques peuvent être absorbées par la faune marine, et à travers la chaîne alimentaire, elles peuvent finir par atteindre les humains. Les plastiques agissent également comme des éponges pour d’autres polluants présents dans l’environnement marin, comme les pesticides et les métaux lourds, concentrant ainsi ces toxines.
Les débris plastiques peuvent enfin servir de radeaux pour des organismes marins, comme des algues, des mollusques et des micro-organismes, leur permettant de traverser de grandes distances et d’envahir de nouveaux habitats.
Ces espèces envahissantes peuvent déséquilibrer les écosystèmes locaux en entrant en compétition avec les espèces indigènes, perturbant ainsi les chaînes alimentaires locales.
A noter aussi que les plastiques perturbent les écosystèmes marins en modifiant les habitats naturels. Les récifs coralliens, par exemple, peuvent être endommagés par l’accumulation de plastiques, qui peuvent étouffer les coraux ou perturber la lumière nécessaire à leur photosynthèse. Les zones de reproduction de nombreuses espèces marines peuvent aussi être affectées par la présence de débris plastiques.

Les microplastiques, des fragments de plastique de moins de 5 mm, et les nanoparticules de plastique encore plus petites, sont particulièrement préoccupants.
Ils proviennent de la dégradation des déchets plastiques plus grands ou sont directement produits sous forme de microbilles dans certains produits cosmétiques et industriels.
Les microplastiques sont susceptibles d’être ingérés via l’alimentation, ils ont été trouvés dans divers aliments, notamment dans les fruits de mer, le sel de table, l’eau en bouteille, et même certains produits transformés. Ces micro-particules sont également présentes dans l’air, notamment dans les zones urbaines et industrielles. Les particules en suspension dans l’air peuvent être inhalées par les humains, atteignant ainsi les poumons. Les études scientifiques actuelles suggèrent que les microplastiques pourraient avoir des effets délétères sur la santé humaine, notamment à travers diverses inflammation, la perturbation endocrinienne, et l’exposition à des substances toxiques.

Les plastiques biosourcés sont fabriqués à partir de ressources renouvelables comme l’amidon de maïs, la canne à sucre, ou la cellulose. Les biomasses utilisées peuvent être très variées et sont généralement classées par génération en fonction notamment de leur mode de production ou d’obtention.
On distingue la biomasse de première génération qui utilise directement des ressources alimentaires de la biomasse de seconde génération utilisant des ressources non alimentaires (coproduits, déchets) et la biomasse de troisième génération, cultivable hors-sol et non alimentaire (Micro-organismes : micro algues, bactéries, champignons, levures, etc.)


Certains plastiques biosourcés sont des équivalents chimiques à des polymères déjà existants (PET,PE ou encore PA biosourcés), quand d’autres proposent des structures innovantes et souvent biodégradables (PLAPHAPBS, etc.), même si ces deux fonctionnalités ne sont pas liées.
D’un point de vue technique, les plastiques biosourcés possédant une structure identique aux polymères pétrosourcés auront les mêmes propriétés et ne nécessiteront alors qu’un investissement minimum pour leur utilisation. Bien qu’issus du vivant, ces matériaux restent non dégradables et susceptibles, s’ils ne sont pas recyclés, d’avoir la même incidence dans leur fin de vie que les plastiques traditionnels.
Certains plastiques biosourcés et biodégradables sont déjà dans notre quotidien. C’est le cas du PLA qu’on retrouve notamment comme matériau de prédilection pour l’impression 3D. Il est également utilisé dans le monde médical pour ses propriétés de bio compatibilité mais on le retrouve également dans la fabrication de films de paillages, de barquettes ou d’emballages diverses (type pots de yaourt). Bien que biosourcé, il n’est compostable qu’en milieu industriel et l’absence de filière de recyclage reste un frein à la démocratisation de ce matériau alternatif.
Les recherches actuelles sont très prometteuses et indiquent qu’avec des améliorations continues, les matériaux biosourcés ont le potentiel de remplacer les plastiques traditionnels dans de nombreuses applications.
Toutefois, dans de nombreux cas d’usage notamment pour l’emballage, cela nécessite encore des avancées supplémentaires en termes de performances matérielles, de coût de production, et de mise en place d’infrastructures adéquates pour la gestion de la fin de vie des produits.
La réglementation devra évoluer en parallèle pour permettre un plus large emploie des matériaux biosourcés. Rappelons qu’aujourd’hui, la proposition de PPWR (Packaging and Packaging Waste Directive) définit un usage restreint des matériaux biosourcés aux sacs de collecte de déchets organiques, aux sachets en plastique légers, aux sachets de thé, filtres ou capsules de café et étiquettes autocollantes utilisées sur les fruits et légumes.
Si la gestion de la fin de vie reste aujourd’hui le frein principal au développement de ces matériaux, une étude est en cours notamment via la fondation AgroParistech et la chaire Copack pour apporter des preuves scientifiques sur le bon comportement de ces plastiques biosourcés en compostage industriel et favoriser l’émergence d’une filière de fin de vie.

Si la réutilisation du plastique est clairement une option intéressante lorsqu’on parle d’usage unique, elle remet en cause profondément nos comportements et nos habitudes en tant que consommateur.
Le cas d’application des emballages alimentaires et bien sûr le cas le plus flagrant. De nombreux freins existent dont la plupart sont d’ordre culturel ; changement d’habitudes, les consommateurs sont habitués à des emballages jetables faciles à utiliser et à éliminer, changement de comportement, le nettoyage et le retour des emballages peuvent être perçus comme contraignant, préoccupations sanitaires, les consommateurs, en particulier dans le domaine alimentaire, peuvent craindre que les emballages réutilisables ne soient pas suffisamment nettoyés, ce qui pourrait entraîner des risques pour la santé et enfin le coût,  les emballages réutilisables peuvent être plus coûteux à l’achat que les emballages jetables, ce qui peut dissuader certains consommateurs, surtout si les économies à long terme ne sont pas clairement perçues.

Pour les entreprises, la réutilisation implique de nouvelles contraintes en termes d’organisation et de logistique avec des défis à relever sur le suivi et la récupération des contenants (voir notre publication du 22 novembre 2023 LIEN ). Cela implique également pour les opérateurs distributeurs de fédérer leurs clients autour de ces nouvelles pratiques de consommation. Aussi, aucun des objectifs de loi AGEC en faveur du développement du réemploi n’ont été atteint à ce jour (comme l’objectif de 5% d’emballages réemployés mis sur le marché en France d’ici 2023).
La construction d’une nouvelle offre de service est donc un enjeu fondamental pour le déploiement du réemploi du packaging.
Le retour de la consigne est une piste à explorer et mise en avant par la commission européenne. Elle pourrait prendre la forme d’une consigne mixte (pour le réemploi + pour le recyclage) comme le préconise l’association Reloop pour permettre une extension plus rapide du réemploi sur une gamme de consommateurs élargie.
A noter aussi qu’à partir de mai 2025, le réemploi des contenants en verre va être testé dans quatre régions de France, la Bretagne, les Hauts-de-France, la Normandie et les Pays-de-la-Loire, annonce faite par Citeo il y a quelques semaines.
C’est un parc de 30 millions de contenants en verre (bocaux, bouteilles), qui vont circuler lors de cette expérimentation Le montant de la consigne sera compris entre 20 et 30 centimes de la bouteille ou du bocal.
L’enjeu est important puisqu’il s’agit bien d’atteindre, cette fois, les objectifs fixés par la loi Agec, soit 10 % d’emballages réemployés d’ici à 2027 !

Conclusion : Vers une utilisation raisonnée du plastique
Le débat autour du plastique bashing met en lumière les contradictions et les défis de notre époque.
D’un côté, le plastique est indispensable pour maintenir notre mode de vie moderne, notamment en matière de sécurité alimentaire et de confort.
D’un autre côté, son impact environnemental est devenu insoutenable, nécessitant une action urgente.
Il est donc crucial de réfléchir à des solutions qui permettent de limiter l’usage du plastique sans bouleverser complètement nos modes de vie. Cela passe par le développement de matériaux alternatifs, la promotion du recyclage, du réemploi et l’adoption de comportements plus responsables, tant au niveau individuel que collectif.
Il est également nécessaire de repenser notre modèle de société, basé sur une croissance continue et une recherche constante de confort, parfois superflu. Cela implique de faire des choix difficiles, mais essentiels, pour préserver notre planète tout en maintenant un niveau de vie acceptable pour tous.
Le chemin est complexe, mais une gestion plus durable du plastique est possible, à condition de trouver un équilibre entre innovation, responsabilité environnementale et maintien des acquis en termes de sécurité et de confort.


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